Notre trésorier, Dominique Nasse a réalisé une synthèse des données architecturales que nous avons sur Saint Fiacre de la Chapelle Pommier. Si on regarde avec attention cette église, elle nous révèle en partie son passé. Elle nous pose aussi des questions. Voyez plutôt…
La pierre de fondation, à l’angle Sud-Ouest de la nef, est en saillie : l’angle a-t-il été refait ?
L’ancienne fondation du mur est à l’extérieur, le mur a t’il été remonté moins large que le premier ? Cette situation traduit-elle un affouillement du sol extérieur ?
La première voûte a été plus haute, et sa régularité a souffert
Le chaînage d’angle semble d’origine, intact sauf peut-être au dessus de la croix de chaînage de droite (Sud)
Une fenêtre étroite a été murée
Une porte ouvrait du chœur vers le Sud (mais la Porte des morts est souvent au Nord) Il faudrait voir sur le cadastre napoléonien où était alors le cimetière.
Le toit de la première nef s’appuyait sur la pierre d’angle qui déborde
Ces premières conclusions permettent de penser que la nef a eu deux états successifs, la seconde nef moins haute que la première. Regardons maintenant le clocher, il a beaucoup à dire.
Les deux fissures verticales, de chaque côté de la croix de chaînage, montrent les limites extérieures des deux baies campanaires où se trouvaient les cloches d’origine ; on les situe bien ; le premier clocher était donc un clocher-mur du type toulousain, comme on en trouve beaucoup dans la région. Voir par exemple, Saint Martial de Valette.
Juste au-dessus du plus gros trou de la fissure de gauche, on retrouve les deux premières pierres de début de l’arc de plein-cintre qui terminait le haut de la baie.
Cette façade montre aussi, plus discrètement, deux ligne obliques symétriques, qui montent depuis les angles vers le haut des anciennes baies. Le raccord est très bien fait, mais aucune pierre du dessous de cette ligne n’allait plus haut. C’est la trace du haut du premier clocher, le clocher-mur à baies. On remarque que la ligne de gauche tangentait exactement le cintre de la baie campanaire : il y a probablement eu suppression d’une pierre de couvertine en rampant du pignon, pierre supprimée lors de la surélévation du mur.
Cette surélévation du mur-clocher était nécessaire pour pouvoir établir au dessus du choeur une chambre de défense, refuge et réserve : la première hauteur ne le permettait pas ; l’abside devait être couverte d’une simple toiture en casquette, sous les baies. Voir, par exemple, Argentine, ou Boulouneix. (On en trouverait peut-être la trace dans la chambre de défense, en bas du mur anciennement campanaire)
Sur le chaînage Nord, comme au Sud (voir 902), les pierres débordantes, dont l’une est cassée, montrent que le toit de la nef s’appuyait plus haut qu’aujourd’hui
Le remplissage de la baie campanaire fait saillie, parce qu’il est plaqué contre, et non lié avec, le rebord ancien de la baie. Cela confirme qu’il est plus tardif. En voyant le caractère fruste et peu soigné du « bahut » (ou chambre de défense) qui constitue le clocher actuel, on peut même se demander s’il n’a pas été édifié dans une certaine hâte, en période de guerre.
Il apparaît donc que le clocher a eu, lui aussi, deux formes successives : à l’origine, un clocher-mur à deux baies campanaires en plein cintre, l’abside étant couverte d’un toit en casquette ; plus tard, le clocher-mur a été surélevé, les baies bouchées et on a construit sur le chœur la chambre de défense qui en forme le volume actuel.
La fenêtre de la sacristie, avec son arrondi et sa feuillure extérieure pour le volet, date clairement du XVIIème ou XVIIIème : on ne faisait ainsi ni avant, ni après.
La sacristie n’est pas chaînée avec l’église, elle a donc été « plaquée » après la première époque.
L’abside : le bas du XIIème en pierre taillée, le haut plus tardif et plus rustique
Au Nord, le mur de la nef est en dedans de la paroi du chœur ; au Sud, il est en dehors (voir 902). Pourquoi ?
A l’angle Nord de la façade, la charpente de la nef a poussé la pierre d’angle qui dépasse
Au bout de la nef côté chœur, de chaque côté, des losanges montrent qu’autre chose existait dessous, mais quoi ?
Les dalles différentes, dans le chœur, indiquent peut-être des sépultures
Sous l’habillage de bois ultérieur, le bel autel de pierre du XIIème
Le fronton du portail Ouest montre t’il la hauteur de la première nef ?
A quoi ont servi les trous carrés, irréguliers, au dessus des arcatures ? (voir 909) On pense à l’ancrage de poutres pour des constructions accotées à l’église
Les traces de l’outil qui a servi à dresser (aplanir) la surface des pierres de taille montrent qu’il s’agit d’un outil du moyen âge, la laye ; plus tard, la technique changea et on utilisa la gradine, qui ne laisse pas les mêmes traces.
S’agit-il bien de l’ancienne fondation du mur de la nef ? Mais les pierres ne sont pas taillées comme le soubassement du chœur…
Le portail vu de l’extérieur
Les baies du chœur, avec les colonnettes engagées encadrant le vitrail de Saint Fiacre,caractéristiques du roman limousin

Ainsi, ce que nous racontent les pierres, c’est que Saint Fiacre a été construite dans la première moitié du XIIème siècle, avec un clocher-mur à deux baies, et que son portail est arrivé un peu plus tard (XIIIème).
Deux grosses modifications se sont produites ensuite : d’une part, le clocher-mur a été comblé et rehaussé pour construire le bahut-refuge au dessus du chœur : c’était très probablement pendant la Guerre de cent ans, au XIV ème.
D’autre part, le mur Sud de la nef a dû s’écrouler (pas le portail, ni le mur Nord). Le mur Nord porte encore une grande litre funéraire extérieure, et cette manifestation de deuil seigneurial fut interdite à la Révolution française. Le mur Nord est donc resté ancien. (voir image n° 7 des photos de Saint Fiacre). La réparation du mur Sud et du toit date très probablement du XIXème, comme le montrent les deux vitraux datés.
Antérieurement, on a installé une nouvelle cloche (XVIIème) et accolé une sacristie (XVIIème ou XVIIIème). Tout cela est vraisemblable, mais nous le disons avec prudence car nous ne savons pas tout avec certitude ; c’est un bon point de départ.
Et les pierres parleront encore…